
En enfourchant la Sprint GT, aucun doute possible: c’est bien une routière. Enveloppé par l’accueillante bulle, le tableau de bord vous charme avec ses beaux compteurs à aiguilles. L’écran digital de droite vous propose d’abord toutes les informations classiques: deux trips partiels, une horloge, une jauge d’essence et une autre de température. En jouant avec les boutons situés sous le compteur, on accède également à une foule de paramètres « automobilesques »: consommation moyenne, consommation instantanée, kilomètres restants avant de vider le réservoir, vitesse moyenne (si, si!)… Le plus étrange reste cet étrange compteur apparemment horaire, qui sert peut-être à calculer la durée de votre trajet. Le temps de vous familiariser avec cet ordinateur de bord, vous serez arrivés à destination! Comble de la commodité, un vide-poches est découpé dans le carénage droit, en dessous du demi-guidon.
Grâce à son seul poste de commandes (n’ayons pas peur des mots), la Sprint GT affirme son identité de baroudeuse et pourra faire sourire les propriétaires de ST, bien contents de revendiquer l’aspect sportif de leur monture. Cependant, une fois le démarreur actionné, la GT abat sa carte maîtresse: son moteur.
La nouvelle Sprint a certes pris un peu de volume et affiche une silhouette plus sobre que sa « petite » soeur ST, mais elle garde les mêmes entrailles. A savoir le fabuleux trois cylindres de 1050cm3, qui équipe également la turbulente Speed Triple. Une fois en route, les gènes de la famille Triple se font évidemment sentir. Légèrement remanié, le bloc enchante par sa douceur à bas et mi-régimes. Au delà, il s’énerve et grogne copieusement jusqu’à plus de 9’000 tours/minute. S’ajoute à cela une sonorité digne de la dynastie des sportives anglaises (à deux ou quatre roues), qui ravira les oreilles averties. La Sprint GT a du punch et on aime ça, même si le moteur pourrait se montrer plus vigoureux sous les 3’000 tours, histoire de dépasser facilement sans avoir à tomber un rapport. Ce n’est donc pas par sa motorisation que l’anglaise pourra décevoir. Elle réussit le grand écart entre souplesse d’utilisation et caractàre, grâce à son trois cylindres magique.
Avec ses 268 kilos et ses deux grosses valises de série, la pauvre GT allait sans doute souffrir sur parcours sinueux. Damned! Encore raté. La Sprint porte bien son nom et enfile les courbes, même serrées, avec aisance. Les suspensions filtrent bien les défauts de la route, même à des allures plus soutenues. La faute à ce fichu moteur, qui incitera le pilote à accélérer la cadence. Le châssis encaissera volontiers vos sautes d’humeur mais vous rappellera vite que vous n’êtes pas sur une Daytona. Jusqu’à un certain rythme, tout se passe bien, mais les plus sportifs se heurteront vite à un freinage pas assez mordant, qui peine à ralentir sereinement le poids de l’engin. L’arrière criera également grâce en s’affaissant lors des sorties de virage musclées. L’effet ressenti est amusant mais forcément peu efficace. La Sprint se révèle assez joueuse mais devient vite rétive si on la cravache. C’est presque rageant, avec un moteur pareil! Alors que le trois-cylindres en veut encore, le châssis abdique et vous force à rendre la main. Rassurez-vous, il y a quand-même de quoi en remontrer à certains pseudos-pilotes.
Il serait dommage de regretter le léger manque de sportivité de la GT. Elle a d’abord été conçue pour voyager. Et ça se voit. Les deux valises livrées d’origine engloutiront avec bonheur vos affaires pour un petit weekend en amoureux. Un top-case est proposé en option et permettra d’emmener encore un peu de chez vous en voyage. Il pourra également servir de dossier au passager, qui bénéficie déjà d’un confort plus que satisfaisant. Placé un peu plus haut que le pilote, il bénéficie d’une assise et d’une vision confortables. Les poignées de maintien remplissent bien leur office, même si le poids reporté sur l’arrière, ajouté à celui des valises, devient alors compliqué à gérer sans un peu d’habitude. Seule ombre au tableau pour ce qui est du confort: les remontées de chaleur du moteur. A faible allure ou à l’arrêt, le bas du cadre chauffe copieusement chevilles et mollets, même protégés par un pantalon en Gore-Tex et des bottes en cuir.
En roulant tranquillement, sans trop solliciter le moteur, on atteint facilement 300 kilomètres d’autonomie, sans souffrir sur le trajet. De quoi envisager de longues balades, seul ou à deux, sur tout type de route.
Après avoir goûté cette recette anglaise de la GT au long cours, il est bien difficile de ne pas en redemander. La porte du garage à peine fermée, les pieds tout juste étendus sous la table, on rêve déjà à sa prochaine virée. On rêve d’aller plus loin encore, tantôt bercé par la rondeur du trois-cylindres, tantôt remué par sa fougue digne d’un hooligan. Le tout dans un confort (presque) digne d’un taxi londonien. Enjoy!