- Je peux y aller, là? - Oui oui, elle a démarré, vous pouvez rouler. Ah! Il a l'air malin, l'essayeur, à ne pas savoir si l'engin fonctionne. L'essai s'annonce déroutant... Il faut dire qu'un cube occupe la place normalement réservée au moteur: c'est la batterie, placée devant le petit moulin électrique, qui propulse la roue arrière grâce à une courroie. L'aspect général de la Zero DS est sympa, avec ce petit look off-road et son petit phare rond. De plus près, on chipotera sur la finition de la partie arrière, pas terrible, ainsi que sur la disgracieuse béquille cubique. Les formes saillantes du réservoir dérangeront plus les cuisses que le regard, mais on les oublie vite pour apprécier le bloc compteur bien pensé et les jolies jantes anodisées.
Avant de me lâcher dans la circulation genevoise, Mikaël Serratrice, manager du magasin, me tend une prise. Tous les 40 kilomètres, il faudra « refaire le plein ». Voilà voilà... Mon côté « j'aime-l'odeur-du-sans-plomb-et-des-gaz-d'échappement-au-petit-matin » crie au scandale lorsque je fourre ladite prise dans mon sac-à-dos. Traître à ma passion, je saute sur la selle très dure de la DS et tourne la poignée droite, bien décidé à filer avant d'être reconnu.
Si l'absence d'embrayage et de sélecteur ne sont pas gênants, c'est l'absence de sonorité moteur qui déroute. Circulation, piétons, oiseaux, on entend tout! Nerveux, je décide de m'extraire de tout ce brouhaha et mets du gaz... enfin, du courant.
Et là, c'est le choc! Le moteur électrique se met à turbiner, émettant un sifflement à mi-chemin entre celui d'un X-Wing et de la DeLorean de Retour vers le Futur! La DS pousse sacrément bien et se faufile aisément dans le trafic. Me voilà tel Marty McFly, doublant un paquet de scooters et d'autos bruyants, sidérés de voir passer une moto sans rien entendre. S'ils tendaient l'oreille, peut-être entendraient-ils le jouissif sifflement du moteur électrique. Sérieusement, on est surpris du punch de ce moteur, qui place la DS en concurrente d'une bonne 125.
Au moindre arrêt, les questions fusent et les commentaires pleuvent: l'intérêt pour cette moto électrique est bien réel. La question la plus fréquente, posée par quelques scootéristes et motards au feu rouge, concernait les performances de l'engin. Au vert, ils avaient la réponse: la DS marche fort! Le châssis n'est pas en reste, affichant un comportement très sain dans les quelques courbes et les giratoires empruntés. Les suspensions sont largement à la hauteur en ville et le système de freinage, même tout neuf, ne déçoit pas. Bon, il est temps de voir ce que vaut la DS en utilisation extra-urbaine!
Une fois lancée sur les routes de campagne, la Zero garde la pêche! Dans les petites courbes, elle se montre tout aussi agile qu'en ville, sa partie-cycle intuitive et facile faisant merveille. Une fois lancé, le moteur offre une poussée constante et vigoureuse. Sans les bruits de la circulation, on entend encore mieux le sifflement jouissif du moulin! Tel Luke Skywalker dans la faille de l'Etoile Noire, tel Marty McFly s'apprêtant à remonter le temps, la Zero DS monte joyeusement à l'assaut du compteur! Bon, ne comptez pas éviter les rayons laser de l'Empire ou dépasser les 88 miles à l'heure: la DS pointe à 105km/h, ce qui est déjà bien suffisant pour s'amuser dans les virages!
Le freinage se montre très convaincant, même fortement sollicité. Bref, la DS dispose de réelles qualités routières. Avec ses pneus bien sculptés, elle s'affranchira même d'un petit parcours sur les chemins. Les randonneurs pourront toujours râler, mais il feront plus de bruit que vous! Avec des possibilités aussi étendues, la DS serait presque l'outil idéal!
Presque, car quelques points viennent limiter son champ d'action. Son autonomie, d'abord. M-way nous avait conseillé de ne pas dépasser les 40 kilomètres, par mesure de précaution sur ce modèle tout neuf. L'autonomie théorique de la DS est de 90 kilomètres, ce qui est correct pour une utilisation en zone urbaine. Pourtant, si l'on se déplace beaucoup dans la même journée, difficile d'aller faire le plein entre midi et deux sans disposer d'une prise sur son lieu de stationnement... Second bémol, la selle, dure comme du pain sec, qui usera vite les fessiers délicats. Il y a ensuite le prix de vente, plutôt élevé. 13'450 francs pour une petite moto, c'est beaucoup.
Un prix d'achat à relativiser: la facture d'essence tombe à zéro et les frais d'entretien courant sont très limités. Le moteur est garanti deux ans, la batterie un, ce qui repousse d'autant les dépenses à ce niveau. L'amortissement d'une moto électrique se fait à relativement court terme. A noter aussi que m-way met en promotion sa Zero DS, à 9'900 francs jusqu'à épuisement du stock 2011.
Pour 2012, Zero Motorcycles annonce des batteries à l'autonomie encore augmentée, ce qui résout notre premier petit tracas. Thomas Schröder, responsable communication chez m-way, précise qu'ils disposent de solutions pour équiper des communes ou des entreprises de bornes de recharge. Certains centres Migros en seront peut-être équipés à l'avenir. De quoi démocratiser l'usage de deux-roues électriques à moyen terme?
Comme le montre la Zero DS, les deux-roues électriques sont de plus en plus aboutis. Son comportement est déroutant tant il est similaire à celui d'une moto « normale ». Pour un usage urbain, le passage au tout électrique devient, avec le temps, une évidence plus qu'une alternative. Un coût d'entretien très limité, des économies sur l'essence, toujours plus chère, et un moteur franchement étonnant: la DS a tout pour séduire. On peut tiquer sur le niveau général de finition, pas encore au top. Son prix élevé ne l'avantage pas pour l'instant, mais avec la généralisation de l'électrique, le tarif devrait devenir plus compétitif. Finalement, le plus gros frein au succès de la Zero DS, comme des motos électriques en général, reste l'a priori du public motard, parfois frileux devant les futures tendances. Foncez essayer ce petit bout d'avenir: il n'est pas si triste que vous le pensez.