Ma brève histoire du temps...
Je n’étais pas (encore) né au moment où le nom de “Thruxton” s’inscrivait dans la légende du sport moto. Menée et cravachée jusqu’à la victoire en 1958 par une autre légende, Mike Hailwood, Mike The Bike en personne ! Je n’étais (toujours) pas né lorsque le twin vertical franchissait la barre des 100 miles/heure au TT, soit 160km/h de ce côté-ci de la Manche; c’était en 1969.
En fait, mon premier contact avec un représentant de la lignée Thruxton a eu lieu en 2017, lors des feux AcidDays. Ce petit galop d’essai sur la Thruxton R s’était conclu avec des sentiments mitigés: grosse patate, bon freinage, partie-cycle stable mais la position était un peu trop en appui sur les poignets...
Premiers contacts
Je suis réveillé par un doux martèlement, au loin, et compris vite que l’équipe Triumph est en train d’installer les motos devant l’entrée de l’hôtel. Une petite vingtaine de Thruxton RS attendent sagement dans cette descente aux pavés humides.
Certaines sont en livrée bi-ton, d’autres en full black, mais toutes sont rutilantes et alignées comme à la parade. Il a plu pendant la nuit et le ciel est resté bas et lourd. Et chargé.
Mince. Prudence.
Culminant à 810mm, la hauteur de selle est raisonnable et permet même à un gros nabot comme moi de bien poser les pieds au sol, presqu’à plat. La moto est fine, avec une échancrure légère qui permet de caler sa cuisse et de serrer ce réservoir long et fin. Elle est aussi légère. Les manœuvres à l’arrêt sont aussi facilitées par un rayon de braquage correct.
Je continue le petit tour du « propriétaire » en attendant que les motos chauffent et là, deux constats: l’équipement est pléthorique et le niveau de finition est très élevée. On note, pêle-mêle : des disques de grand diamètre (310mm) pincés par des étriers Brembo M50, un bouchon de type "Monza" avec couvercle en alu brossé, un té supérieur de fourche en alu poli coiffant une fourche Showa BPF de 43mm de diamètre. Cette dernière est couplée à des combinés Öhlins à bonbonnes séparées, le tout avec 120mm de débattement tant à l’avant qu’à l’arrière. ... Et si jamais, un catalogue d'accessoires riche de 160 pièces (dont une tête de fourche très café racer) est disponible pour se concocter une monture aux petits oignons...
La ligne de la moto est fine et racée, soulignée par la présence d’une selle monoplace coiffée d’un capot. Un phare rond trône fièrement à la proue. Au final, l’allure générale est très élégante.
Contact.
Les 1200 cm3, 105 ch, 112 Nm se réveillent et le twin s’ébroue dans un martèlement feutré.
La position, autre bonne surprise, n’est pas trop basculée sur les poignets, les demi-guidons étant positionnés suffisamment hauts et ouverts. Les jambes ne sont pas trop pliées et, au final, on se retrouve installé presque comme sur un roadster.
Un travail a été effectué en profondeur au niveau de la mécanique. Selon Triumph, cela a permis de réduire l’inertie du moteur de 20% tout en gagnant 500tr/min de régime maxi, ce dernier culminant désormais à 8.000 tr/mn. Les 105 chevaux sont disponibles plus haut et le couple de 112 Nm, plus bas. Le tout en étant compatible avec Euro5.
Deux ou trois coups de gaz bien décidés et le martèlement feutré se transforme alors en grondements sourds. Oups. Comme si vous venez de marcher sur la queue du mâtin.
Il est temps de partir.
Concert de Twins dans les collines de l’Algarve
Nous quittons l’hôtel dans une procession disciplinée. Nous sommes le premier groupe et suivons Joe Akroyd - l’homme aux multiples participations au Tourist Trophy nous ouvre la voie et il connait bien les pièges des routes des environs. Nous profitons d’une accalmie, une petite fenêtre météorologique, mais la chaussée reste humide par endroits. Le mode « Rain » reste donc enclenché pour le moment - surtout ne pas se mettre par terre. La moto est votre alliée dans ces conditions peu avenantes. Elle est étroite. Elle est agile, est très maniable, et se balance sans effort. On ne se croirait pas aux commandes d’un 1200cm3 de 197kg à sec merci le pneu arrière de 160/60 et à l’équilibre général.
Le moteur est doux et rond aux allures de balade. Mais il fait preuve d’un tout autre caractère lorsqu’on lui « rentre » dedans. C’est ce que l’on a pu vérifier dans l’après-midi, sur routes séchantes et offrant un meilleur grip, mode « Sport » activé. Et là, la réponse à la poignée de gaz est plus vive et il faut ressentir la vigueur avec laquelle ce moteur m’extrait (catapulte ?) des virages. Il reprend comme un élastique géant jusqu’au rupteur. Dans un grondement qui deviendrait presque addictif. Le moindre bout de ligne droite est prétexte à monter une vitesse, juste pour pouvoir accélérer à fond, comme un sourd. Juste pour voir l’aiguille se ruer depuis les plus bas régimes (sans cogner) vers la zone rouge, et sentir cette poussée ferme me propulser vers l’avant… Et entendre ce grondement sourd et puissant des deux grosses gamelles de 600cm3 dans leurs œuvres.
Et ensuite qu’est-ce que ça freine! Fort et longtemps, dans une attaque massive et franche. Le train avant encaisse sans bouger ; la fourche absorbe mais la moto ne bronche pas. Même lors des quelques freinages sur l’angle.
Les pneumatiques ont été une bonne surprise lors de cette journée d’essai: les tout nouveaux Metzeler Racetec RR K3 ont montré des prestations superbes tant sur le séchant que sur le franchement mouillé. Montant en température assez rapidement, ils se sont ensuite montrés rassurants, faisant preuve d’un niveau de grip important, tout au bénéfice de la sécurité et du plaisir de pilotage sur l’adhérence parfois changeante de certaines portions des routes de l’Algarve.
En parlant de plaisir, la descente vers l’hôtel s’est faite à bonne allure, voire à très grande vélocité… Et, le rythme s’accélérant, on apprécie la précision du guidage, on joue avec la gouaille du moteur, tellement prompt à dégainer la zone rouge et tout en savourant la qualité des liaisons au sol. Et l’on finit par prendre des angles d’obtus. Et l’on finit par sourire sous son casque, tout en traversant ces paysages somptueux à des vitesses peu avouables…
Les derniers hectomètres avant d’arriver se feront sous adrénaline, sous endorphines, sous le charme de cette bande son, rhaaa.
En résumé
La Thruxton RS est donc une moto totalement aboutie, pouvant à la fois enrouler sur un rythme de balade ou enquiller comme un sagouin avec le même bonheur.
Bien suspendue, légère, agile, précise et dynamique, la Thruxton dans sa déclinaison RS est une belle (re)découverte. Plus qu’un néo-rétro, au delà du café racer, la nouvelle Thruxton RS peut aussi s’envisager comme un vrai roadster, moderne et comme on les aime: du caractère et du punch, jubilatoire et attachant.
La Thruxton RS sera disponible en concession à partir de fin février à partir de 16’840CHF, dans les deux coloris présentés ici (Jet Black et Matt Storm Grey & Matt Silver Ace).