« Baisse d’un ton et ferme-la » ou quand une menace sourde plane sur les circuits et les sports mécaniques…

DS Events, gestionnaire du circuit d'Albi, vient d'être condamné pour des nuisances sonores. Une première en France.

En longeant le circuit d’Albi par la Nationale 88 en direction de Toulouse l’été dernier, je ne pensais pas que le circuit serait autant sous les feux des médias six mois plus tard et qu’il représenterait l’ultime croisade pour les riverains mais aussi l’ultime ZAD (zone à défendre) pour les amoureux des sports mécaniques de France et de Navarre…

Non, je m'étais juste fait la remarque qu’il était bien proche des habitations... Aujourd’hui, ma réflexion s’inverse et je me dis désormais que ces habitations se trouvent bien proches du circuit…

Flashback.

DS Events, gestionnaire du circuit d'Albi, vient d'être condamné pour des nuisances sonores, pour dépassements des niveaux sonores à 58 reprises entre avril et juin 2019. L'amende salée s'élève à 14'500 euros, auxquels s'ajoutent 52'800 euros attribués aux parties civiles et quelques 4'000 euros de dommages et intérêts versés à l'Association des riverains de l'autodrome Albi-Le Séquestre (ARAS).

Un montant qui pourrait n’être que provisoire car plus de 200 plaintes doivent être instruites. « Le circuit altère la qualité de vie et la santé des riverains et méprise la réglementation », selon les riverains et leur représentant… Dans un contexte volatile, c’est un gros coup de massue et difficile à absorber pour une trésorerie déjà bien mise à mal… Selon les médias (dont Le Parisien), l'avocat de DS Events a fait appel, en ajoutant que la décision « ne tient pas compte de la préexistence du circuit à l'installation de ceux qui s'en plaignent ».

Un plus retour en arrière sous forme d’une vue aérienne du circuit en 1962 et celle, de 2016, accessible sur le site de Géoportail. Entouré de champs jadis et sous Séquestre aujourd'hui (le circuit est situé sur la commune du Séquestre), ces deux images-ci valent bien mille mots… 

Que vient renforcer une photo de l’article de Libération et dans laquelle on voit une fenêtre ouverte… sur un pif-paf du circuit… Cherchez l’erreur. Et l’on vous renvoie également à cet excellent cartoon de Lorenzo Lucidi (Sogni Lucidi Comics).

"Ça suffit le bruit, j'habite ici !"

Entre temps et suite à sa condamnation par le Tribunal de Police, le circuit d’Albi a fait appel de la décision de justice. Voici un extrait du communiqué, publié le 20 janvier par le circuit sur sa page FB notamment: « Cette décision est incompréhensible. L’emplacement du sonomètre incriminé a été décidé par l’ARS (Agence régionale de santé) et la préfecture du Tarn. Ce sonomètre situé à 30m du circuit a conduit l’État à nous demander l’édification d’un mur anti-bruit dans un délai de 12 mois, 3 mois de délais supplémentaires ayant été ajoutés suite au 1er confinement de 2020. La construction dudit mur a été faite dans les délais, toutefois nous avons quand même été condamnés… ». Pour en comprendre les tenants et les aboutissants, les conflits, les intérêts voire les conflits d'intérêt, nous vous conseillons l'excellent reportage de Daddy Go Ride, intitulé "Enquête, Le circuit d'Albi et les Riverains".

Un cas à suivre donc. Et qui stigmatise bien des craintes, des incompréhensions et des rancœurs dans le clan des amoureux des sports mécaniques. Est-ce un cas à part ou au contraire, un cas qui est amené à se répéter ?

Car plus proche de nous, il y a le circuit de Bresse. Situé à à peine une heure et demi de Genève, c’est le plus rapidement accessible des circuits de vitesse. C’est un circuit qui est en service depuis Mars 2006, avec la mise en place en 2008 d’un ensemble de points de surveillance des nuisances sonores. Ainsi il n’y a eu pas moins de trois points de mesure : une station-mère située sur le circuit, complétée par deux autres stations (situées respectivement à 1km et à 800 m du circuit, toutes deux installées sur les toits des habitations riveraines). Et même avec ce dispositif en place, des associations de riverains se plaignent depuis quelques années des nuisances sonores – AcidMoto en avait fait l’écho par le passé et nous relations que, aux côtés des deux associations, une centaine de riverains des communes de Frontenaud, Le Miroir et Sagy étaient engagés dans la procédure contre le circuit.

La question est de savoir : qui sera le suivant ? Le Lédenon, nos montagnes russes préférées et perchées sur cette colline qui surplombe le village éponyme ? Dijon-Prenois (notre cliché d'illustration)? Alès ?

Les sports mécaniques sont dans le collimateur. Les circuits deviennent plus stricts et renforcent leurs mesures contre les nuisances sonores. Les contrôles, tant statiques que dynamiques, deviennent systématiques et plus sévères. Et les responsables des circuits n’hésitent pas à agiter les black flags (drapeaux noirs) lors des roulages pour niveaux sonores excessifs. Les organisateurs de roulages loisirs, tous sans exceptions, exhortent les pilotes inscrits à respecter les consignes et normes en vigueur, au nom de l’avenir du sport et des journées pistes.

Et même l’illustre parmi les illustres, le Doctor lui-même, n’est pas à l’abri des plaintes du voisinage, pour le bruit des motos et... la poussière que ces dernières soulèvent.

Galerie