Sortie, donc, en 1985, la sept et demi impose des chiffres jamais vus à l'époque: 100 chevaux, 176 kilos (201 avec les pleins)! Succès commercial immédiat, avec environ 14'000 unités vendues en 1985! La GSX-R 750 s'impose dans tous les comparatifs, tient la dragée haute à une concurrence alors bien plus lourde. Tout simplement parce que la Suz' est un produit dérivé de la compétition, avec des matériaux et des procédés inédits: cadre (renforcé par des profilés en acier) et jantes en aluminium, fourche de 41mm réglable et refroidissement air/huile.
Un succès total malgré un manque de stabilité reconnu dont souffraient les premiers modèles. Un manque corrigé au fil des ans, notamment sur la première évolution de la 750, dès 1986. Une année qui voit arriver la "grosse" GSX-R 1100. C'est la même, mais gavée de chevaux! Elle va faire chavirer le coeur de bien des motards, avec un moteur de caractère que certains passionnés regrettent aujourd'hui encore.
Suivant ensuite une évolution au gré des ans, la 750 se dote d'un nouveau moteur à refroidissement liquide en 1992. Le cadre et le bras oscillant sont modifiés pour plus de rigidité. On profite d'une GSX-R plus rigide, certes, mais souffrant d'un certain embonpoint... Sept ans après sa première apparition, la GSX-R 750 a pris 30 kilos! La concurrence, Honda CBR 900 en tête, est plus légère, plus affûtée.
On casse tout et on recommence! En 1996, las de se faire malmener par la concurrence japonaise, Suzuki frappe fort avec la GSX-R 750 SRAD. Exit le cadre typique de "l'ancienne génération" et bienvenue à un élément périmétrique entièrement en aluminium! Suzuki traque les kilos en trop partout, adoptant nombre de pièces évidées (comme l'axe de roue) mais au diamètre augmenté. La recette miracle du gain de poids.
Mais le nouveau moteur est clairement l'autre point fort de la Gex'! Avec son système Suzuki Ram Air Direct (SRAD), soit l'admission d'air forcée aujourd'hui si répandue, elle affiche 128 chevaux pour un poids de 206 kilos tous pleins faits. La sept et demi est de retour et lutte avec des sportives de plus fortes cylindrées sans aucun complexe! On fête d'ailleurs l'arrivée de la première GSX-R 600, calquée esthétiquement sur sa grande soeur (ce qui est toujours le cas).
Il n'y aura que l'arrivée de la R1, en 1998, qui viendra freiner le succès de la GSX-R. Le bijou de Yamaha fait entrer les sportives dans une nouvelle ère. Mais Suzuki ne l'entend pas de cette oreille...
En 2000, une nouvelle GSX-R 750 arrive. Des formes encore plus rondes, plus de couple, plus de puissance et, surtout, plus de légèreté encore. Au chrono et sur la route, la 750 est encore dans le paquet de tête et se permet même de taxer les 1000 sur certains circuits. Magique équilibre entre puissance et facilité, la 750 cartonne! De son côté, la 1100 s'est embourgeoisée et ne parvient pas à lutter avec les 1000, ayant conservé son "vieux" cadre et affichant bien trop de kilos pour se défendre honorablement. Il va falloir attendre 2001 pour que Suzuki remette les pendules à l'heure.
Et PAAAF! C'est cette année que débarque la GSX-R 1000, qui va, comme en 1985, mettre absolument tout le monde d'accord. Quasi-identique à la 750 en termes de design, on reconnaît la 1000 à sa fourche anodisée or, ses étriers 6 pistons (4 sur la 750) et son énorme pneu arrière de 190mm. La concurrence ne s'en relèvera pas! En 2003, après la sortie d'un nouveau millésime de la Yamaha R1 et de la Honda CBR 954RR, Suzuki en remet une couche avec la version K3. Une esthétique affûtée, un moteur toujours plein comme un oeuf mais avec 4 chevaux de plus, alors que la concurrence restait déjà sous les 160 chevaux du premier millésime 1000cm3.
Un peu malmenée par la R1 de 2004, avec son look à tomber par terre et ses 172 chevaux, ainsi que par la Kawasaki ZX-10R monstrueusement bien née, la Gex' reprend le pouvoir en 2005 avec une mouture exceptionnelle. Un nouveau moteur de 178 chevaux pour un poids ridiculement faible: 166 kilos à sec. Le tout dans une partie-cycle ultra facile et un confort bien supérieur à la concurrence. Des arguments de poids pour la route et le circuit, sur lequel elle s'impose d'ailleurs avec le titre de Troy Corser en Superbike.
Les 750 et 600 suivent le mouvement mais rompent avec l'esthétique de la grande soeur 1000. Toujours aussi facile, la légendaire sept et demi rencontre un succès mérité, même si elle se retrouve un peu "le cul entre deux chaises" depuis que sa petite soeur s'est radicalisée pour lutter à armes égales dans une catégorie 600 de plus en plus affûtée.
Aujourd'hui, la GSX-R 1000 souffre, comme la majorité des sportives japonaises, de l'assaut européen. Des sportives du Vieux-Continent ultra-radicales, qui déchaînent les passions des pistards et des amateurs de belles mécaniques. Avec un retard certain au niveau des aides électroniques, la Gex' profite encore d'un confort bienvenu sur route et d'une facilité de tous les instants. Mais on n'attend qu'une seule chose, c'est que Suzuki parvienne à jeter un nouveau pavé dans la mare Superbike et mette la concurrence à mal.
Presque une utopie, car les constructeurs japonais se remettent de la crise et des drames qui ont frappé leur pays en s'attaquant à des marchés plus rentables et plus raisonnables. Mais qui sait... la mythique sportive bleue et blanche pourrait bien, un jour, revenir et frapper fort.