Nous sommes maintenant à moins 48 heures des premières montées de l’entame du championnat 2022. En effet, ce weekend, nous serons à Marchaux, une petite commune dans le Doubs voisin et, par « championnat », je parle bien sûr du Swiss Moto Legend Trophy (SMLT) 2022, car le championnat de France de la Montagne a déjà commencé il y a trois semaines de cela avec les épreuves de Demandolx (dans les Alpes-de-Haute-Provence, vers les Gorges du Verdon) et celle de Chanaz, le weekend dernier en Savoie.
Le SMLT se déroulera cette année, on croise les doigts, sur 6 épreuves avec la finale se déroulant en terres helvétiques, sur le magnifique tracé du Schallenberg (on vous y avait emmené-e-s avec nous en immersion sur un weekend – lire les récit1 et récit2).
Mais avant de se retrouver à la cale, à Marchaux, revenons un peu en arrière. Là où tout a commencé. Et souvenez-vous, c'était hier: c’était à Verbois (récit), entre vignes et voie ferrée, et c’était en octobre 2021. Le fameux championnat « intergalactique » de Genève. Une expérience ô combien stressante, mais pas moins jubilatoire grâce à Jean-Luc Ronchi qui nous avait prêté sa GSX-R pour le dimanche, et grâce aux organisateurs qui avaient joué le jeu. Et hautement addictive… Je venais, je le savais, je le sentais, de mettre le doigt dans un engrenage. Et venais de me faire happer le bras. Puis mon âme toute entière. Sensations intenses que de chevaucher ces montures nées aux temps de mes premièrs émois mécaniques et motocyclistes. De mes premières Amours, aussi. Mais qui sont entretenues parfaitement (les motos, hein), bichonnées comme des princesses et qui tournent comme des horloges… Oui, tout un dimanche entre peur et jubilation. Puis (sur)vint le lundi, avec sa question, de ces questions qui réclamaient une réponse inconditionnelle et immédiate : « à quand la prochaine ? »…
En 2022, je ferai partie du Rustic Team, une équipe de 3 compères et leurs compagnes, qui ont bien voulu de ma vieille carcasse. Le deal est venu au cours des discussions et le tout s’est scellé autour d’une bonne tablée, à l’ancienne, avec boissons fermentées et ripailles. Nos motos sont un peu à notre image, et forment une famille nombreuse et recomposée : la magnifique Ducati 916 de Laurent (numéro : 973), avec moult pièces (dont des éléments Öhlins) à faire pâlir les modèles Factory de l’époque, la Yamaha YZF SP de Cédric qui a terminé 3ème du championnat SMLT en 2021, et qui arborera donc le numéro 903 – exit le 957 mais le fameux cochon trônera toujours à la poupe. Il y a enfin la Suzuki GSX-R 1100 (1986) d’Éric qui sort cette année de restauration et tous deux sont prêts à en découdre sous le numéro 999…
Reste donc ma pomme. Et la tâche est ardue: trouver une moto, bien entretenue, prête à courir, belle et fiable, avec un propriétaire soigneux, le tout qui ne me coûte pas l'autre bras, ni un rein… Bref la quadrilature du cercle et un cahier des charges plus qu'ambitieux. Et là, autant chercher la perle rare, ou en utilisant une image plus… mécanico-rustique, une aiguille de gicleur dans une botte de foin. Et pourtant… Les réseaux sociaux aidant (il n’y a pas que du négatif avec), un ami d’un ami me lance un message amical. Alain vendrait sa belle Suzuki GSX-R 750 de 1988.
Je connais Alain, on se suit sur les réseaux, on se salue dans les paddocks. Et il a roulé la Belle lors de l'épreuve de Frangy, en Septembre 2021 avec le "910". L'affaire est rapidement scellée en trois messages et une poignée de mains, là encore à l’ancienne. Véritable encyclopédie vivante, intarissable, Alain est un amoureux des belles mécaniques, avec cet amour de la belle pièce et ses motos sont toujours entretenues aux petits oignons. Une première visite en décembre dans son fief, puis la belle part en révision et en auscultation chez le Docteur es Soupapes, et on va la chercher pile une semaine juste avant la journée d’entrainement qu’Alain organise au circuit de Pouilly-en-Auxois (en dessous de Dijon-Prenois) et à laquelle les concurrents du SMLT participaient en masse (une petite vingtaine).
Premiers contacts, premières vocalises, et premières émotions. Je lui tourne autour, donne religieusement quelques coups de gaz, tente d’apprivoiser son point de patinage, apprends sa procédure de démarrage et respecte son temps de chauffe…
J’apprends. Nous faisons connaissance.
On se toise. On s'apprivoise. À Pouilly, puis à Vaison Piste et enfin sur le circuit de Bresse lors des roulages AcidTracks. Miss Gex a du répondant, mais il faut bien la garder dans les tours. Ses réactions sont saines (gros travail sur les suspensions...), son freinage est puissant (Alain a fait quelques changements là aussi) et constant, mais il faut vraiment se cracher dans les mains et l’emmener dans les courbes, ce qui met à mal ma condition physique de lombric. Et j’allais oublier, Miss Gex est aussi très portée sur la boisson et a même failli me faire le coup de la panne sous les yeux de son ancien propriétaire !
N'empêche que je me suis surpris à Bresse à la contempler admirativement, campée fièrement sur ses béquilles, à l’écouter ronronner doucement et monter en température avant de prendre la piste. Car Miss Gex est belle - bon je ne suis pas impartial, là. Je l’aime et nous allons vivre une belle aventure ensemble cette année. Je l’espère.
Mais en attendant, dans moins de 48 heures, toutes ces journées de préparation, toutes ces réflexions, tout cela ne sera plus que de l’histoire ancienne. De vagues et lointains souvenirs. Il n'y aura plus que le tracé de Marchaux, Miss Gex et moi. Et je contiendrai tant bien que mal mes émotions. Messieurs/Dames, placez donc cette cale et place à la course !
Place à la vraie vie, la trépidante, la palpitante, la cruelle parfois, et que le championnat commence !