
Croiser une MV Agusta en Suisse est plutôt rare (285 immatriculations au 1er septembre 2013). Seulement, la simple évocation de ce nom illumine d'admiration le regard de n'importe quel passionné de moto. Regardez au fond de ses yeux, une moto grise et rouge avec un rond jaune doit y passer... Après être passé deux fois tout près de la faillite, Claudio et Giovanni Castiglioni ont racheté en août 2010 la totalité des parts qui appartenaient alors à Harley-Davidson.
Pour eux, il y a urgence à ouvrir la marque à un public plus large que ceux qui sont intéressés par la très élitiste, mais désirable, F4, ou les roadsters Brutale. Il faut proposer une autre motorisation que les 1000cm3 du 4 cylindres maison, mais aussi un autre type de moto. Les ingénieurs du centre de recherche se sont penchés sur un trois-pattes de 675 cm3 (tient donc, comme la Daytona 675...) qui sera aussi réalésé à 798cm3. Un moyen simple de produire deux motorisations en maîtrisant les coûts.
Le moulin de la Rivale produit 125 chevaux, soit la même puissance que la Brutale et 23cv de moins que la F3 800. Le couple lui, gagne 4Nm au même régime que le roadster. Un des atouts de ce moteur est sa taille compacte et son poids réduit (52kg). Pour gagner en taille, les circuits de refroidissement ont été intégrés au bloc. De plus, le moteur est pourvu de la technologie du vilebrequin au sens de rotation inversé par rapport aux roues. En rétrogradant, le moteur montera dans les tours ce qui crée une force inertielle contraire à celle des roues, ce qui améliore la maniabilité et permet de freiner plus tard par exemple.
A l'étage de la transmission, on trouve une boîte extractible à six vitesses et supervisée par un système électronique d'assistance au changement de rapport (EAS). Simple comme un shifter, il permet de garder les gaz ouvert à l'accélération ou à vitesse constante, et sur un filet de gaz en ville ou avec la poignée soudée, vous pouvez monter les rapports sans embrayage, même à froid (l'ingénieur me l'a dit tel quel!).
Pour assurer la compétitivité de leurs nouveaux modèles, toutes les machines qui sortent des ateliers de Varèse sont équipées des dernières technologies. Ainsi, le MVICS (Système embarqué de gestion véhicule et moteur, en français) a fait son apparition pour tirer le meilleur de ces motos au travers du système ride-by-wire.
Le logiciel de ce système pourra d'ailleurs être mis à jour gratuitement chez votre concessionnaire. Il en sera de même pour tous ceux qui ont déjà ce système sur leur MV, si la date de sortie du dernier logiciel sur le site internet est antérieur au votre, vous pourrez le faire changer. Les techniciens de Varèse travaillent en ce moment même sur un moyen de le faire tout seul de chez soi.
Sur la Rivale, la commande au guidon permet d'accéder à trois modes de conduite prédéfinis mais aussi à un quatrième qui laisse carte blanche au propriétaire pour ajuster son bijou transalpin. Des paramètres tels que la réponse du moteur, le régime maximum, la courbe de couple, la sensibilité d'accélération et de frein moteur peuvent être réglés par le biais du MVICS. Les modes pluie, route et extrême peuvent même être changés gaz ouvertes.
Uniquement lié au mode pluie, le contrôle de traction est étagé en neuf niveaux d'intrusion. Sur 0, il est totalement inactif et sur 8 il est au maximum. Ce que j'entends par "lié", en mettant la cartographie pluie avec le MVICS, le traction control sera toujours réglé au maximum. En revenant sur un autre mode vous retrouverez la dernière valeur sélectionnée. Les autres modes ne changent pas le niveau du TC.
Pour le dessin, l'équipe d'Adrian Morton n'y est pas allé par quatre chemins. Le phare avant pointu est un allèle fort du génome MV Agusta. On retrouve déjà ces traits sur la F4 de 2003. Ne pas l'intégrer à la Rivale, qui a une vocation sportive, aurait été une hérésie. La façon dont plonge le réservoir derrière la tête de fourche rappelle, elle, la gamme Brutale. Les flancs, très galbés et qui donnent envie d'être touchés, procurent un côté imposant à la partie entre le pilote et le guidon. Tout comme le très large réservoir, qui même démonté de la moto, rappelle immanquablement une MV Agusta.
Au centre du guidon prend place le tableau de bord sous la forme de deux rangées de témoins et d'un écran. La vitesse et le régime moteur sont naturellement affichés en permanence, ainsi que le degré de contrôle de traction et le rapport engagé. Lisible et complet, on regrettera l'absence de jauge à essence ; il faudra jouer du compteur kilométrique partiel pour avoir une idée de la distance restante avant d'aller à la pompe.
Dans le menu et avec les boutons du commodo gauche, certains paramètres de la moto peuvent être réglés en roulant (quickshifter et niveau de contrôle traction). Au hasard des menus, je suis aussi tombé sur un limiteur électronique de vitesse. Pratique une fois réglé sur 60 pour rouler en ville ou 120 pour un bout d'autoroute. Malheureusement, celui-ci n'est pas lié à la cartographie moteur personnalisée mais est actif en permanence. Il faudra se servir des boutons "Set" et "OK" pour à nouveau libérer la moto.
Ces boutons couverts de caoutchouc souffrent d'un manque de précision lorsqu'appuyés avec des gants. En plus de ne pas être totalement intuitif, je me suis souvent attardé sur le tableau de bord plutôt que la route pour opérer un réglage. Le bouton de démarreur sert à changer les cartographies. Cependant, ce n'est pas optimisé car le changement n'est pas toujours très clair.
Le pouce gauche doit encore opérer le bouton des clignotants. L'échanger avec celui du klaxon aurait été un plus, lors de l'essai un changement de direction donnait lieu à un concert dans le groupe d'essayeurs.
Pour MV, qui dit trois-cylindres dit aussi trois sorties d'échappement. En toute simplicité, ce sont trois flûtes qui partent du catalyseur pour s'échapper vers le cale-pied passager en suivant l'arrondi de la roue. Seules les quatre sorties de la F4 Tamburini sont plus simples, mais on ne reprend pas qu'un seul détail d'un mythe.
A l'arrière, on sent tout le soin apporté au style par les Italiens. Là où il n'est pas rare de trouver un support de plaque avec phare et clignotants dignes d'un carrossier pour véhicule utilitaire, la firme de Varese a cherché de vraies solutions. Un phare arrière est intégré de chaque côté de la roue dans le flanc de la Rivale, tandis que les clignotants sont venus se placer de chaque côté de la plaque, elle-même reliée au monobras de la même manière que sur la Ducati Diavel. Pouvoir contempler ce passage de roue et ce pneu sans presque rien en travers est un réel plaisir. Bravo MV pour cette idée !
Disponible en trois coloris : un gris mat assez tendance, un noir métallisé indémodable et enfin le combo rouge/argent si cher à MV Agusta depuis l'époque d'Agostini. Petit détail pour savoir si les carrosseries venaient à être changées, le châssis tubulaire de la rouge est noir et le châssis des noire et grise est rouge.
En version bicolore, l'omniprésence de gris surligné par le rouge assoit visuellement la moto sur la route. De face, c'est encore plus impressionnant avec les protège-mains intégrants les rétroviseurs, les feux de jour et les clignotants. La forme de T ainsi dessinée tasse la machine et annonce clairement que la Rivale veut avaler du bitume.